Raymond Duffaut n’a pas pris sa retraite, artistique du moins. S’il n’est plus aux affaires à l’Auditorium du Thor depuis quelques années déjà, ni aux Chorégies d’Orange depuis 2016, s’il n’est plus conseiller artistique à l’Opéra du Grand-Avignon,  Raymond Duffaut n’a pas quitté pour autant le chant lyrique, son univers. Lui, qui se présente comme un paresseux, a pris récemment la présidence des Saisons de la voix à Gordes et il maintient ses activités au sein du Centre français de promotion lyrique. On n’est pas étonné de cette persévérance à faire éclore de nouvelles voix, ou de les guider. Depuis 1974 et sa première direction, il s’est évertué à défendre le chant français.

Raymond Duffaut, expert-comptable alors, avait été appelé en 1974 à prendre la direction de l’opéra d’Avignon. En 1981, la municipalité orangeoise était venue lui demander de prendre les rênes des Chorégies d’Orange qu’il a quittées en  2016. Il a rendu son bureau de conseiller artistique de l’opéra d’Avignon l’année dernière. Fidèle à sa ligne de conduite de donner la possibilité aux jeunes artistes de se produire, Raymond Duffaut a lancé un concours en partenariat avec l’opéra d’Avignon. La maison d’opéra vauclusienne a  baptisé ce concours de son nom. Un bel hommage.
Son sourire en dit long d’avoir pu vivre au quotidien sa passion  pour la musique classique et l’opéra plus encore : « J’ai eu la chance de pouvoir rester dans la ville de naissance. C’était formidable. On m’a proposé d’autres maisons d’opéra, mais j’ai fait le choix de rester. Et puis Orange n’était qu’à 30 kilomètres. » Raymond Duffaut livre sa face cachée : « En fait, j’aime une vie tranquille et paresseuse. Heureusement qu’il y a cette passion pour le chant et que je n’ai jamais eu le sentiment de travailler. » La paresse n’empêche pas l’exigence et Raymond Duffaut explique qu’on a pu lui faire ce reproche : « D’un autre côté, j’ai eu Solange comme secrétaire à Orange depuis 1985 et Sabine au Thor depuis 1984. »
Si aujourd’hui il y a une chose que regretterait Raymond Duffaut c’est de ne plus avoir à se battre ou à convaincre pour défendre ses idées sur la culture et sa diffusion : « On nous dit toujours que l’opéra coûte cher. Il faut préserver les emplois. J’ai rencontré M. Roubaud président du Grand Avignon. Je lui ai dit que ce n’était pas cohérent de mettre 20 millions de travaux et de réduire le budget de fonctionnement de 900000 euros. » Raymond Duffaut note ce qu’il se passe en Italie : « C’est dramatique, et à l’exception de quelques maisons comme Milan ou Venise, les artistes sont payés à 90 jours, voire six mois. C’est suréaliste.»

Il remarque que toutes les structures voient à la baisse le nombre de productions maison, comme il compte aussi le nombre de chanteurs français dans leurs distributions. Bien qu’il se dise opposé à des quotas, conscient que la mondialisation est omniprésente. La promotion du chant lyrique passerait par les concours à écouter Raymond Duffaut, même s’il sait pertinemment que le public est vieillissant : « On a remarqué toutefois que le concours Voix nouvelle, diffusée sur la Toile en direct, a été suivi par 1,8 millions d’internautes et que 70% avaient moins de trente ans. C’est peut-être un problème de prix de places. »
Il retient surtout que les lauréats 2018 sont invités à donner 24 concerts, dont un au Liban avec une tournée qui commencera le 24 septembre au Théâtre des Champs-Elysées.
Au vue des réductions budgétaires, Raymond Duffaut estime aussi que le jeune chanteur est fragilisé : « Je pense que c’est plus un problème de direction que d’agent. Et je ne vois pas un chanteur refuser un rôle à un directeur car il estime que c’est trop tôt pour sa voix. Mais c’est ainsi qu’on en voit disparaître au bout de quelques années. »
Toujours pour aider la jeune génération avec le Centre français de production lyrique, Raymond Duffaut travaille à une opérette qui serait montée à l’horizon 2020. De jeunes chanteurs sollicitent Raymond Duffaut régulièrement : « Ca fait comme une audition, sauf que c’est un seul conseil que ces jeunes chanteurs viennent chercher. Ce ne peut pas être par intérêt, je n’ai plus rien à leur proposer. »

Bruno ALBERRO

 

En bref: Les 10e Saisons de la voix de Gordes (84) présentent :

  • Deux concerts d’été au théâtre des Terrasses à 21h45 : Le mercredi 18 juillet Une nuit chez Monsieur Offenbach, et le samedi 21 juillet Correspondances ;
  • Un concert d’automne à l’espace Simiane : le dimanche 30 septembre à 18 heures ;
  • Un concours international de la mélodie, présidé par le mezzo Karine Deshayes : les samedi 27 et dimanche 28 octobre à l’espace Simiane ;
  • Le concert du Bout de l’an : le samedi 29 décembre à 18 heures à l’espace Simiane.

Renseignement au 06 84 77 97 36 ou à www.lessaisonsdelavoix.com