Si vous espérez une Traviata totalement dévoyée de son histoire ou de son contexte, si vous espérez une Traviata spatiale ou au contraire reportée à la préhistoire, alors la version de l’Opéra de Marseille, proposée encore ces 31 décembre et ce 2 janvier n’est pas pour vous.
La facture de cet opéra de Verdi est on ne peut plus classique, que ce soit la mise en scène de Renée Auphan,  dans les décors IIIe Empire de Christine Marest ou la direction musicale du maestro Nader Abassi. Là aussi pas de gestique démonstrative ou polluante et pas de situation où les artistes dans des costumes signés Katia Duflot se retrouvent dans des situations incongrues ou grotesques qui ne servent que la gloriole du metteur en scène. Efficacité et rigueur sont de mises. Ici, les artistes, sur le front de la scène, suivent la lecture et sont prêts à répondre aux attentes du chef devant un Orchestre de l’Opéra de Marseille enjoué et fidèle.
Il y a classique et classique à l’opéra, comme le convenu qui apporte peu de choses et qu’on oublie. Ici, les deux réalisateurs servent l’ouvrage de Verdi inspiré du roman d’Alexandre Dumas : La dame aux camélias. Leur approche commune libère les chanteurs et les installent dans une position confortable pour une compréhension aisée, sans nécessité d’accrocher le regard aux écrans du sur-titrage.

Traviata à Marseille 2018 photo Christian DRESSE 2018

Nicole Car retrouvera l’Opéra de Marseille en février où elle sera Marguerite dans Faust de Gounod. Photo crédit Christian DRESSE.

Cette Traviata se lit sans ennui, d’autant que la distribution s’identifie aux protagonistes de ce drame où la plupart des solos, duos, quatuors, et plus, sont connus et font dresser l’oreille. Chaque mélomane a sa version de Triavata. C’est tout le défi des chanteurs et du maestro de créer une version toute personnelle. Le premier hommage revient à Nicole Car dans le rôle de Violeta, la dévoyée. Ce rôle est complexe théâtralement, mais surtout vocalement, car le soprano change de tessiture à chaque acte : une fois colorature, une autre fois lyrique ou encore dramatique pour traduire les états d’âme de cette femme qui reflètent la palette des sentiments humains. Son duo avec Germont incarné par le baryton Etienne Dupuis est le reflet de cette soirée. Lui aussi ne se laisse pas impressionner par toutes les légendes qui ont porté le costume de la tradition et de la bonne morale incarnée. Son col romain ajoute à la rigueur vestimentaire mais n’empêche pas de nuancer les sentiments partagés de Germont. Tandis que Nicole Car passe de la femme éperdue à la femme perdue. On attend de l’entendre dans le rôle de Marguerite de Faust programmée en février.
Violetta se laisse séduire par l’Alfredo d’Enea Scala qui doit monter le ton pour se dresser à la hauteur sa maîtresse et se montrer convaincant. Trop souvent Flora s’affiche plus en copine de pensionnat qu’en amie de bringue. Là, le mezzo, Laurence Janot réussit son affaire, n’hésitant pas à se glisser dans la peau d’une danseuse de revue.
Carine Séchaye endosse avec assurance la robe de service de la douce et séide Annina.  Jean-Marie Delpas retrouve le rôle du baron Douphol qu’il connaît bien pour l’avoir interpréter sur de nombreuses scènes. Sans faute note, Frédéric Cornille, Antoine Garcin, Florent Leroux-Roche, Wladimir-Jean-Irénée Boukaert et Tomasz Hajok complètent cette affiche marseillaise. Dans cet opéra, le chœur de l’Opéra de Marseille, préparé par Emmanuel Trenque, a su répondre présent ; comme dans le chœur des bohémiennes et cet air « Noi siamo zingarelle » de acte II et dans chœur des matadors « Di Madride noi siami mattadori » qui suit.

Bruno ALBERRO

 

Photos crédit Christian DRESSE.

En Bref :

La Traviata de Verdi à l’Opéra de Marseille les lundi 31 décembre et mercredi 2 janvier à 20 heures.

  • Le dimanche 6 janvier  à 16 et 20 heures concert du Nouvel an avec le violoniste Da Min Kim ;
  • Le 9 janvier à 17h15 Une heure avec l’opérette viennoise ;
  • Le 13 janvier concert symphonique avec la pianiste Dana Ciocarlie ;
  • Les 19 et 20 janvier La veuve joyeuse de Franz Léhar ;
  • Le dimanche 27 janvier à l’Odéon Le mariage aux lanternes d’Offenbach ;
  • Le dimanche 27 janvier au Silo concert symphonique avec la pianiste Szymon Nehring ;
  • Du 10 au 22 février, Faust de Charles Gounod.

Renseignement à l’Opéra de Marseille ou au théâtre de l’Odéon