Après le concours de Gordes, le soprano Iryna Kyshliaruk revient du concours de chant de Mâcon avec trois prix: celui de l’orchestre, le prix du jeune espoir féminin et le prix de la Cité de la voix. Etudiante au Conservatoire national supérieur de Paris, elle se voit offrir un concert à l’Opéra du Grand-Avignon pour la saison 2019-2020. Si elle vit en France depuis cinq ans, elle n’oublie pas son pays frappé par la guerre.

Si vous prononcez bien son nom, avec l’accent de l’Ukraine, vous avez une chance de devenir l’ami d’Iryna Kyshliaruk. Cette tirade amuse la soprano qui vient de gagner le concours de mélodies de Gordes, organisé par les Saisons de la voix, association présidée par Raymond Duffaut, accompagnée par la pianiste et complice franco-taiwanaise Yun-Ho Chen. A la suite elle a obtenu trois prix au concours de Mâcon : Prix de l’orchestre, le prix du Jeune espoir féminin et le prix de la Cité de la voix. Ce dernier lui ouvre une résidence. Toutefois, elle sourit en ponctuant que tous ses amis n’arrivent pas à dire son nom correctement : « Mais j’aime bien ceux qui font l’effort d’essayer. »

Cette dernière année au Conservatoire national supérieur de Paris, c’est aussi celle des concours qui lancent les artistes dans la carrière.  D’autres concours suivront pour ces deux jeunes femmes qui se réjouissent d’ors et déjà de leur prix obtenu à Gordes : « Comme il est remis par l’Opéra du Grand Avignon, je serai invitée à un concert l’an prochain. Et puis avant, les six lauréats de chaque catégorie suivront une master-class avec la pianiste Susan Manoff. C’est un belle chance de pouvoir travailler une semaine avec une telle pianiste.»

Iryna Kyshliaruk, soprano ukrainienne a remporté le prix des mélodies à Gordes

Le soprano ukrainien, Iryna Kyshliaruk,  a remporté le prix des mélodies à Gordes organisée par Les Saisons de la voix et elle est revenue de Mâcon avec trois prix.

Si d’aucuns rebutent à concourir ou à s’exposer devant un jury, Iryna Kyshliaruk voit dans la préparation de ces rendez vous un moment important : « C’est celui des choix pour élaborer un programme ; on choisit une esthétique et on la défend. On se sait pas comment réagit le jury, mais je crois à la sincérité et à l’authenticité. »

Retenu, pour le 3cycle au CNSM, le soprano travaille à un projet sur Ophélie, personnage des univers opératiques, elle pourrait lui ouvrir une série de concerts ; bien consciente qu’il faille travailler pour avancer. Les espoirs sont là, puisqu’en mars dernier, elle a tenu le rôle de Cléopâtre dans l’opéra « Giulio Cesare » de Haendel, la production du Conservatoire de Paris.

Si le chant est tout pour elle, Iryna Kyshliaruk ne cultive pas une ambition démesurée, elle préfère rester  fidèle à elle-même, malgré tous les aléas. Prête à se fier à ce que l’avenir lui dira.

Même si le problème ne se pose pas pour elle, Iryna Kyshliaruk sait bien qu’au-delà des qualités lyriques, le public et les décideurs sont attachés aussi au physique, qu’il soit en concordance avec le rôle demandé : « Je n’ai pas d’expérience de refus dans ce domaine, mais notre société est guidée par l’image et l’opéra n’y échappe pas, le problème est général. On cherche l’être idéal : beau, sexy, intelligent, spontané, de l’humour etc. Hormis les grands connaisseurs qui viennent écouter des voix, le public vient voir un spectacle. »

Ses cinq années passées en France, n’ont pas fait oublier à Iryna Kyshliaruk son pays natal, Elle est née à Tchernivtsi, à 600 kilomètres au sud-ouest de Kiev, la capitale. Si vibrato il y a dans sa voix c’est de voir remonter les images de son pays déchiré par la guerre, avec la présente Russie qui a annexé une partie du pays : « J’ai toujours été attirée par la France. Le français était ma première langue étrangère. Au cours de mes études au Conservatoire de Kiev, j’ai senti un grand manque de connaissance. Je pense aussi que c’est bien de chanter dans une langue qu’on connaît. Ce projet de partir à l’étranger avait commencé très jeune. En suivant mes études, j’ai pu passer un an en Allemagne à Leipzig et ensuite à Paris. »

Approcher les problèmes de son pays, avec l’annexion de la Crimée par la Russie, c’est marcher sur des œufs. Le trouble d’Iryna Kyshliaruk est perceptible. Elle évoque un des collègues musiciens, parti se battre et qui est mort arme à la main en Ukraine : « C’est un sujet sensible et cette situation me tient à cœur, mais c’est difficile d’en parler. Je ne crois pas que ce soit aux artistes de s’exprimer, même s’ils sont patriotes, comme moi ; ça n’empêche pas d’être responsable. Entre artistes nous nous retrouvons pour donner des concerts de bienfaisance. »

Iryna Kyshliaruk, soprano ukrainienne a remporté le prix des mélodies à Gordes

Iryna Kyshliaruk est en lice au concours de chant de Mâcon.

Trois écoles lyriques : trois formations différentes, selon le soprano ukrainien : « En France, l’enseignement est polyvalent. On aborde le répertoire classique, baroque ou contemporain. A Paris, le niveau est très élevé, c’est sans doute la meilleure école au monde ; on travaille avec de grands artistes et de grands professeurs. En Allemagne, j’ai apprécié de séjourner dans la ville de Jean-Sébastien Bach où j’ai appréhendé le lied et la mélodie. »

Le goût de la musique lui est venu enfant, à la maison : « La mère voulait jouer du piano, mais elle était d’un milieu modeste et ça n’a pas été possible. »

Le goût du chant a grandi en participant à un chœur de musique folklorique : «De là, je me suis dirigée vers le chant lyrique. »

Elle retourne régulièrement dans son pays, elle a été invitée à donner un concert ce mois d’octobre, à l’Opéra National de Kiev, sous la direction de Mykola Diadura.

Elle y était auparavant, cet été. pour se retrouver à la table familiale : « Il est important de conserver cette connexion avec mon pays. » Iryna Kyshliaruk rappelle, amusée, que les repas de famille se terminent en chansons.

Bruno ALBERRO

 

Photo crédit Camille McOuat

La vidéo d’Iryna Kyshliaruk

 

Où entendre Iryna Kyshliaruk ?

  • Du 12 au 18 octobre au concours de chant de Mâcon (71) organisé par l’association Mâcon symphonie;
  • 2019-2020 Recital dans le cadre de la saison de l’Opéra Grand Avignon ;
  • Juin 2019 Festival Chopin à Nohant récital chant-piano avec Yun-Ho Chen ;
  • Juin 2019 Rôle du Feu,  dans “L’enfant et les sortilèges” de Ravel ;
  • Le 28 novembre 2019 Concert avec l’orchestre des lauréats du Conservatoire à la Cité de la Musique, sous la direction de Philippe Aïche.

Projet discographique :

Au cours de l’année 2019, sortie d’un CD pour la label Mirare avec des mélodies de Rachmaninov, Liszt, Mussorgski.  Iryna Kyshliaruk est accompagnée au piano par Yun-Ho Chen.

Renseignement sur sa page Facebook Iryna Kyshliaruk