
Pour la première fois en 150 ans, les Chorégies d’Orange affichent Guillaume Tell, l’ultime opéra de Rossini. Il sera présenté au théâtre antique un seul soir : le vendredi 12 juillet à 21h30 avec Nicola Alaimo dans le rôle titre avec Annick Massis en Mathide ou encore Nicolas Courjal en Gessler.
Le plus souvent Jean-Louis Grinda a son franc-parler, du moins il ne mâche pas ses mots. L’an passé, le directeur des Chorégies d’Orange faisait remarquer que Mefistofele de Boito était trop rarement à l’affiche comme c’est le cas cette année avec Guillaume Tell de Rossini dont il signe la mise en scène au théâtre antique ce 12 juillet : « Les gens sont paresseux », résume Jean-Louis Grinda. Pourtant il trouve des raisons à présenter cet ouvrage : « Guillaume Tell fait partie du répertoire et il faut le défendre. Certains disent que tel ouvrage n’est pas repris parce qu’il coûte cher, c’est une bêtise. Dans Guillaume Tell, il suffit de faire des coupes justes. On arrive à 3h30 de spectacle, entracte compris, c’est moins de Don Carlos (NDLR opéra de Verdi). Ce qui est important c’est de trouver l’équilibre artistique. Souvent on a tendance à couper les reprises, mais parfois ça rend l’opéra plus long car on ampute le sens. Je me dis aussi que j’ai raison avec cette programmation. L’an passé, l’Opéra de Lyon ouvrait avec Mefistofele, cette année avec Guillaume Tell.» Jacques Brel donne raison au directeur et metteur en scène. Ne chantait-il pas : « Qu’il est plus humiliant d’être suivi que suivant. Au suivant, au suivant »
Pour expliquer son choix et sa vision de l’ouvrage écrit en 1829, Jean-Louis Grinda s’est entouré d’Eric Chevalier pour la scénographie, Françoise Raybaud pour les costumes, Laurent Castaingt aux lumières et Eugénie Andrin pour la chorégraphie. Jean-Louis Grinda souligne que les ballets ont été conservés. Sans doute pas dans toute leur longueur, Eugénie Andrin ajoute d’ailleurs : « Les figurants ou les choristes auront une gestuelle qui ressemble à de la danse. Dans le premier acte, on fait même danser les enfants. La danse apporte une forme de poésie. »
La satisfaction de Jean-Louis Grinda est aussi de retrouver une distribution similaire à sa production de 2015 à Monte-Carlo : « Avoir avec nous Annick Massis, c’est avoir sans doute la meilleur soprano française, mais elle chante rarement en France. »
Eric Chevalier glisse qu’il est venu à Orange pour la première fois en 1969, il y a tout juste 50 ans : « C’était pour un Faust. Ici je retrouve mon monde d’enfant quand je jouais à créer des théâtres d’ombre. Pour Guillaume Tell, nous aurons recours à la vidéo. Elle couvrira le mur car on ne peut pas lutter contre lui. Il faut rester modeste. »
Pour affirmer le sérieux du livret, Jean-Louis Grinda rappelle que Rossini, pour son ultime opéra, a repris les arguments du poète allemand Schiller qui allie l’homme et la nature, le minéral contre le végétal : « On parle de révolution où l’église n’intervient pas. Même le mariage est pastoral.»
« Cette production reprendra les costumes de la version de 2015 », souligne Françoise Raybaud. Elle les situe au début du XIXe siècle dans le monde de la paysannerie. Les chanteurs, figurants et choristes risquent d’avoir chaud, si leurs habits sont adaptés aux montagnes suisses où se déroule l’argument du héros tutélaire helvétique qui a donné la liberté à son pays face à l’envahisseur autrichien.
L’argument
Guillaume Tell est l’ultime opéra écrit par Rossini inspiré l’histoire de ce héros suisse qui s’est opposé à l’envahisseur autrichien. Derrière ce personnage dont l’épopée se réduit le plus souvent à l’épreuve de la pomme posée sur la tête de son fils et qu’il doit fendre d’un trait d’arbalète, Rossini pense à son expression de la liberté.
Nous sommes en 1829, Rossini a 37 ans, le succès a été permanent et il laisse en héritage un ouvrage souvent réduit pour le grand public à son ouverture, connue pour cette cavalcade épique. Ce serait dommage de condenser cet opéra de plus de trois heures et demie à ces quelques minutes d’introduction. L’opéra est rarement donné du fait qu’il nécessite de nombreux solistes : onze, quand la plupart des opéras se limitent à quatre, cinq ou six. Sans oublier l’importance de l’orchestre.
Et puis le décor est différent au fil de l’histoire, il glisse du bord du lac aux montagnes ou à la fête ou encore au cœur d’une tempête, une allégorie où la liberté triomphe de l’oppression.
Le programme 2019
Les Chorégies d’Orange fête leurs 150 ans du 2 juillet au 6 août, cette année avec douze dates pour treize spectacles. Deux opéras sont à l’affiche : Guillaume Tell de Rossini et Don Giovanni de Mozart. La VIIIe symphonie de Mahler sera à la dimension de l’événement avec l’Orchestre national de France et le Philharmonique de Radio-France réunis pour la première fois de leur histoire. Outre les concerts et la danse avec Roméo et Juliette du ballet de Monte-Carlo, la venue de la soprano Anne Netrebko, la présence de Placido Domingo, et le singulier prince de la musique électro au sein du festival lyrique étoffent l’affiche.
- Le 11 juillet, concert Jeff Mills ;
- Le 12 juillet, Guillaume Tell de Rossini ;
- Le 16 juillet, concert des Révélations classiques Adami ;
- Le 17 juillet, Ballet Roméo et Juliette ;
- Le 20 juillet, gala Netrebko et Eyvazov ;
- Le 29 juillet, la VIIIe Symphonie de Mahler ;
- Les 2 et 6 août, Don Giovanni de Mozart ;
- Le 4 août, Ciné-concert avec Jean-François Zygel.
Renseignement aux Chorégies d’Orange