Le hasard, ou le signe du destin selon la croyance, a voulu que Debora Waldman soit invitée à diriger l’Orchestre régional Avignon-Provence, sans savoir au moment de la signature du contrat avec les Musicales du Luberon qu’elle serait élue à la tête de la phalange avignonnaise en septembre 2020. Certes pour ce concert qui mettait fin à l’édition des 30 ans de l’association présidée par Patrick Canac, la jeune chef d’orchestre disposait d’un double effectif avec l’Orchestre de l’Opéra de Toulon pour répondre au besoin de la Ve symphonie de Beethoven à l’affiche de cette soirée aptésienne, qui s’est déroulée dans la cour Jean-Giono.
Un nouveau lieu pour le festival de musique classique, adapté physiquement avec ses gradins et sa scène, au qualité acoustique un peu mat pour réverbérer toutes les nuances de cette œuvre généreuse, dans ses masses et ses subtilités. L’acoustique s’est trouvé plus écrêté encore en première partie dans le double concerto de Brahms qui réunissait la violoncelliste Sonia Wieder-Atherton et le violoniste Amiram Ganz. Si le triple concerto de Beethoven distingue dans chaque mouvement un instrument, celui de Brahms nécessite une communion, même une fusion des cordes pour peindre l’esprit d’une reconciliation quand deux amis décident de passer l’éponge après une fâcherie et qu’ils se retrouvent entre l’envie de tout dire et d’écouter l’autre pour effacer leurs désaccords. Ce sentiment d’aller vers l’autre s’entend dès le début du premier mouvement quand Sonia Wieder-Atherton coupe la parole à l’orchestre qu’elle est rejointe par le violon d’Amiram Ganz, les archets étalent les couleurs de la complicité et le charme opère à suivre les dialogues dont celui de l’improbable quand le violon s’amuse à jouer plus bas que le violoncelle et que s’inverse les sentiments de l’âme.
Sol, sol, sol, mi bémol, fa fa fa ré, ré. Cette série de notes est sans doute la plus connue de la musique. Sa beauté mémorielle s’écoute dans la simplicité de leur agencement. C’est l’art de Beethoven avec ses premières mesures de sa Ve symphonie que devait diriger Debora Waldmam. Elle s’est dressée sans complexe devant cette littérature immense du compositeur viennois, une fois encore inspiré par l’universalité.
La future baguette de l’orchestre d’Avignon a pris à bras le corps cette partition, préférant une sobriété précise à une faconde trop aisée et une direction ampoulée. Debora Waldman s’est concentrée sur sa battue, sans emphase, offrant une lecture claire et limpide pour contrôler le tempo et la cadence, piquant les notes pour aiguiller les pupitres. Sa main gauche classique se tourne vers le haut pour les crescendo ou vers le bas pour indiquer un diminuendo espéré. Elle obtientle caractère de l’instant dans l’amplitude mesurée de sa gestique.
La simplicité est le propre du grand art. Debora Walman en a été ce dimanche 4 août sous le ciel de clôture des Musicales du Luberon, un instrument.