La cantatrice Isabelle Cals ne tient pas à se limiter à ses qualités vocales naturelles. Après douze ans de production qui l’ont conduite de scènes nationales aux scènes internationales huppées, la chanteuse a décidé de mettre sa carrière en semi-parenthèse pour prendre le temps de se former et d’améliorer sa technique. On pourra l’entendre au mois de novembre à l’Opéra de Marseille dans la IXe symphonie de Beethoven.

Mezzo au début de sa carrière, Isabelle Cals a choisi de devenir soprano et du coup de parfaire sa technique vocale, quitte à mettre sa carrière en semi-sommeil pour travailler, travailler, travailler. Elle s’est rendue compte de cette nécessité, pour atteindre ses objectifs, et de pouvoir chanter longtemps, en toute facilité. Une décisions pas si facile à prendre quand on a commencé à se faire un nom comme mezzo, avant que quelques conseils avisés l’encouragent à glisser vers une tessiture plus aiguë. Mezzo, c’est la période où elle a connu le ténor autrichien Nicolaï Schukoff, devenu depuis son mari. Elle l’a accompagnée cet été 2019 aux Chorégies d’Orange où Nicolaï Schukoff faisait partie des huit solistes invités à chanter le VIIIe symphonie de Mahler. Ils ont pris tous deux l’habitude de s’écouter l’un l’autre au cours des répétitions : « On n’est ni bienveillant, ni critique, on est juste, pour que ce soit bien. »

Tous deux ont acquis une maison dans le Lot que le mari retape, comme il retape les meubles, il est vrai qu’avant de devenir chanteur, il a suivi sur une formation d’ingénieur en génie électrique : « Mon mari se sent profondément latin et se sent mieux ici qu’en Autriche. »

Le Lot rappelle à Isabelle Cals que le Sud Ouest est le berceau de sa famille, qu’elle a besoin de cette relation avec le monde de son village pour ne pas se couper de la réalité et du bon sens que procure la terre. Elle raconte que régulièrement, avec son mari, elle donne un concert où une charrette sert de scène : « Quand on gagne suffisamment sa vie, on peut donner de son temps pour une juste cause et pour son village. »

Quand on lui demande si ce n’est pas frustrant de vivre avec un ténor connu et reconnu, Isabelle Cals confie sans sourciller qu’au début de leur union, c’était elle qu’on adulait : « Celle qui était connue c’était moi, Nicolaï commençait sa carrière, à ce moment il était en troupe en Allemagne. Il chantait Don José et je tenais le rôle de Carmen. Je sortais du Centre de formation lyrique de l’Opéra national de Paris, j’avais peu de technique mais un joli timbre et les choses sont allées vite. Je vivais un conte de fée. »

D’aucuns ont remarqué que chanter comme mezzo ne correspondait pas forcément à sa voix. Devenir soprano nécessite pour elle de reprendre à zéro ou presque, quitte à mettre entre parenthèse sa carrière et prendre le risque d’être oubliée dans un univers ou le jeunisme est prégnant : «Je ne regrette pas et je ne changerai pas. Ce que j’aime c’est le chemin pas le but, oui le chemin m’intéresse plus. La reconstruction  fera partie de ma carrière. »

Quand certains chanteurs font attention à donner une image sans tache à cause des réseaux sociaux qui véhiculent des informations et des images à la vitesse grand V, Isabelle Cals préfère rester naturelle : « Nous faisons un métier d’une beauté incroyable. Nous montons sur scène pour le plaisir de partager des émotions. Si on ne travaille que sur l’image qu’on doit donner de soi, il y a des limites. Plus on entre dans ce jeu, plus le rôle qu’on se donne est important et moins on est libre. Les chanteurs sont des gens normaux, la plupart sont sympathiques, on a le droit aussi de se montrer bon vivant. A force de montrer de fausses images de soi, on n’est plus réel.» 

Bruno ALBERRO

 

Renseignement à Isabelle Cals