Quelle est la part dominante chez l’Homme ? C’est la question posée à l’opéra de Marseille jusqu’au dimanche 6 octobre par Numa Sadoul qui signe la mise en scène de la Flûte enchantée de Mozart, dans des décors et des costumes de Pascal Lecocq.

L’écrivain, metteur en scène, utilise ses armes pour développer notre monde où chacun est partagé par ses dualités, entre son côté blanc et son côté noir, le terrestre et le céleste, ses aspirations contreversées et ses oppositions féminin-masculin. Sans oublier ces trois enfants qui se déguisent au fil des deux actes en une galerie de portrait de bande dessinée, 9e art cher à Numa Sadoul. Mais au final, quand tous les protagonistes reviennent à la raison et délaissent leur doute de l’avenir et leur peur d’abandonner leur confort, le trop n’est-il pas l’ennemi du bien ? Doit-on tout poser sur le plateau et livrer une facture toute digérée par des acteurs à qui on demande d’exagérer les situations jusqu’à la caricature ? Ne peut-on laisser un espace de liberté aux spectateurs qu’ils puissent réfléchir afin d’avancer à leur gré sur le chemin de la découverte ?

L’opéra est de la musique qui se voit, alors fermez les yeux et laissez vous porter par la maîtrise littérale de Laurence Foster. Le maestro américain à la baguette devant sa phalange qu’il dirige depuis 2012 a montré qu’il a gardé une âme d’enfant allant vers la simplicité et une authenticité pour alléger le message d’universalité et d’humanisme délivré par Mozart.

Il n’est pas nécessaire de connaître la partition de La Flûte enchantée pour en siffloter un passage et le plus souvent c’est l’air de la Reine de nuit, aria vertigineuse tellement connue qu’on attend les ornements souples et majestueux de la soprano colorature appelée, ce jour. La maison opératique phocéenne ne s’est pas trompée en faisant appel à la cantatrice turque Senerade Uyar, même si sa gestuelle est plus proche d’une mère enragée que d’une reine dont on espère une attitude au-delà de celle du simple mortel. Elle est une habituée du rôle qu’elle interprète depuis 2006, qu’elle a même chanté à Salzbourg dans la patrie du génie autrichien.

Wenwei Zhang incarnait le roi Sarastro, exemple de droiture et de protection de ses sujets. La basse chinoise a traduit de toute son âme cette rectitude d’un timbre froid et profond.

Après « Le Nozze di Figaro » en fin de saison passée, l’opéra de Marseille retrouvait la soprano belge Anne-Catherine Gillet toujours à l’aise et agile dans la littérature de Mozart, bien que sa Pamina manquât de fragilité et de doutes, comme on pourrait l’entendre d’une princesse en quête de l’amour absolu.

Le jeune ténor normand Cyrille Dubois aime à dire quand il évoque sa carrière : « Passe ton Mozart d’abord. » Il a réussi à rester sobre au cours de ses épreuves imposées. Le baryton Philippe Estèphe a traduit les fantaisies attendues de Papageno, l’oiseleur. Il s’est démené pour paraître ce rustre se limitant au plaisir terrestre et commun. Il trouve en Caroline Meng une Papagena de caractère imposant son mezzo dans le duo.

Le ténor Loïc Félix a retrouvé le personnage de Monostatos, toujours difficile à dépeindre entre l’amoureux déçu et le bouffon. Le ténor guyanais a pris le parti du bouffon, ridicule et inconscient que son amour envers Pamina ne peut atteindre dans les degrés supérieurs.

Anaïs Constant, Majdouline Zerari et Lucie Roche composent le trio des trois dames. Elles donnent envie de les voir et entendre dans d’autres rôles pour mettre en avant leurs qualités vocales.

Bruno ALBERRO

 

La Flûte enchantée de Mozart à l’Opéra de Marseille 

  • Le dimanche 29 septembre à 14h30 ;
  • Le mardi 1er octobre à 20 heures ;
  • Le jeudi 3 octobre à 20 heures ;
  • Le dimanche 6 octobre à 14h30.

Renseignement à l’Opéra de Marseille