« Non ! La musique ne vieillit pas, elle est intemporelle, ce sont les goûts qui se transforment », analyse Daniel Chappuis, chef d’orchestre. Il est invité au festival Musique Baroque en Avignon, le samedi 16 novembre à 20h30, au Palais des papes.

Un lieu en adéquation avec la musique qu’il défendra en s’installant au pupitre de direction devant l’ensemble composé par la Haute école de musique de Genève. Il poursuit sa réflexion : « La musique c’est comme les pyramides égyptiennes, c’est le reflet d’une époque, l’expression de la société. »
Alors quand on entend la VIIIe symphonie de Mahler avec deux cents musiciens et dont certains se lèvent quelques secondes pour un coup de triangle, est-ce que les époques étaient riches pour s’offrir un tel luxe ? Daniel Chappuis corrige cette appréciation : « Avant, on demandait à un autre instrumentiste d’intervenir, au pianiste par exemple, d’intervenir au triangle ou pour un coup de gong. Mais on a professé le métier de percussionniste. Maintenant je ne crois pas que la musique coûte moins chère aujourd’hui qu’hier, quand on sait le montant de certains cachets d’artistes vedettes. Les musiciens sont mieux payés aujourd’hui qu’avant. Le coût de fonctionnement aussi est plus élevé.»
Daniel Chappuis rappelle au besoin que la musique ne doit pas être sacralisée et s’accrocher à une forme d’orthodoxie : « De tout temps, les compositeurs ont travaillé et modifié leurs partitions en fonction des artistes présents. Ils s’adaptaient. Monteverdi corrigeait même en fonction de la sonorité de la salle. Les compositeurs s’adaptaient même aux conditions financières en modifiant des effectifs. Il faudrait sans doute remettre l’adaptation au goût du jour. »
Il s’amuse d’une anecdote  en suivant un Don Giovanni de Mozart où il a fallu changer une chanteuse car une était malade et sa remplaçante ne chantait pas dans la même langue que le reste de la distribution : « La musique est vivante et il n’y a pas de version idéalisée. Quand on veut jouer la musique de Philippe de Vitry, il faut plonger dans cette musique qui a plus de sept cents ans, humblement, pour comprendre les techniques d’écriture du passé. La façon de décoder une partition est différente au XIVe ou au XVe siècle que de nos jours. Souvent quand on évoque la musique ancienne, on parle d’interprétation historiquement informée. C’est le nouveau terme. Moi, je préfère dire qu’on a besoin d’une interprétation historiquement formée. »
Daniel Chappuis s’autorise une comparaison avec son enfance dans la ferme de ses grands-parents : « On m’a appris à faucher. Il reste des faux dans le monde, mais on ne fauche plus à la main tout est mécanisé. Et dans quelques siècles plus personne ne saura les utiliser. Et pour ce faire, il faudra retrouver le geste. On sera informé que nos ancêtres coupaient l’herbe avec une faux mais sans savoir comment ils faisaient. C’est pareil avec la musique ancienne, on doit de (re) former à la jouer dans l’esprit de l’écriture des compositeurs. Quelle est la logique du geste ? »
Est-ce que la musique médiévale et baroque a été sauvée par la musique contemporaine boudée par le public ? « Quand j’écoute la musique de Rameau, je trouve que c’est incroyable qu’elle a été écrite en 1730 et que nous sommes en 2019. Jouer Bach ou Rameau c’est une façon de conserver une culture et de la transmettre. Il y a de la magie. Mais la musique de la Renaissance a aussi ses difficultés d’accès comme la musique contemporaine. » 

Bruno ALBERRO

Photo Romain Delafosse

Prochains concerts de Musique baroque en Avignon

  • Le samedi 16 novembre à 20h30 à Avignon au Palais des Papes la Haute école de musique de Genève ;
  • Le dimanche 8 décembre à Avignon au Palais des Papes le Quatuor Girard ;
    Le samedi 11 janvier 2020 à 20h30 au Le Pontet à l’Auditorium du Grand Avignon : La Chapelle Harmonique ;
  • Le dimanche 9 février 2020 à 17h00 à Avignon au Conservatoire du Grand Avignon, Amphithéâtre Mozart Thibaut Garcia, guitare baroque ;
  • Le dimanche 15 mars 2020 à 17h00 à Avignon à la Collégiale Saint-Didier : Les Nouveaux Caractères; ;
  • Le jeudi 30 avril 2020 à 20h30 à Avignon à l’Opéra-Confluence Jakub Jozef Orlinski, contre-ténor et l’Ensemble Il Pomo d’Oro
  • Le dimanche 17 mai 2020 à  17h à Avignon au Conservatoire du Grand Avignon, Amphithéâtre Mozart l’Ensemble Sébastien de Brossard ;
  • Le samedi 6 juin 2020 à 21h45 à Avignon dans les Jardins du Musée Calvet Concert anniversaire des 20 ans de Musique baroque en Avignon avec Léa Dessandre, mezzo-soprano, Thomas Dunford, direction et luth et l’Ensemble Jupiter.

Renseignement à Musique baroque à Avignon