Les artistes souffrent des reports et des annulations des spectacles. Ils perdent leur moyen d’expression. La violoniste Annabelle Berthomé-Reynolds vient de sortir un double disque consacré aux Sonates pour Violon de Grazyna Bacewicz chez Muso. Elle vient aussi de capter « Solo », une pièce pour violon seul de David Chaillou, composée en 2019. Annabelle Berthomé-Reynolds enseigne aussi au Conservatoire de Roubaix où elle pratique la neuropédagogie. 

Certes comme beaucoup, elle préfèrerait être dispensée de cette période de confinement suite à la pandémie du coronavirus, mais comme à quelque chose malheur est bon, la violoniste analyse cette situation avec intérêt : « Cela pose des questions sur le plan psychique. Nous ne sommes qu’au début. J’y vois aussi un intérêt sociologique car il va y avoir des répercussions et des prises de conscience, même si ça change doucement pour l’instant. Je pense que nous allons passer par des phases qui sont similaires à celles du deuil : choc, abstraction, colère, dépression, isolation, acceptation et adaptation. On ne sait pas combien de temps dureront ces phases. Je pense que les choses auxquelles on tenait seront différentes. Cette époque laissera des traces dans notre conscient personnel mais aussi dans l’inconscient collectif. On est dans une époque où nos sens sont hyper sollicités, dans l’excès. »

Comme professeur, Annabelle Berthomé-Reynolds est fonctionnaire territoriale et les professeurs artistiques agréés par l’Etat ont leurs salaires garantis. Mais sa situation –presque privilégiée- ne l’empêche pas de s’intéresser à ses autres collègues artistes intermittents, moins bien lotis : « Quand on voit des concerts annulés, ça me désole. Je préfèrerais lire qu’ils sont suspendus. Pour ma part, j’étais invitée à France Musique le 4 avril. Mais comment sera-t-il possible de repousser à plus tard toutes les invitations ? Dans certains festivals qui devaient avoir lieu prochainement, les programmations sont déjà bouclées pour les deux ans à venir. On va aller de report en report. »
Annabelle Berthomé-Reynolds évoque aussi un problème artistique surtout dans la préparation : « Quand on prépare un programme, cela nécessite un temps de préparation qui est à la fois physique et mental. C’est comme pour un sportif de haut niveau qui s’entraine à une compétition pour un jour J. Ça veut dire que tout ce qui a été préparé est à recommencer. Je ne me sens pas frustrée pour autant et nous, les artistes, nous sommes tous dans le même bateau dans cette dé-programmation sans précédent.  Il est important de pouvoir se projeter et il est essentiel de continuer de programmer des concerts et démarrer des projets qu’on peut amener dans des délais raisonnables. »

Bruno ALBERRO

 

La vidéo d’Annabelle Berthomé-Reynolds

Renseignement à Annabelle Berthomé-Reynolds