Dans son deuxième opus, la soprano Roselyne Martel Bonnal alterne des mélodies françaises de Chausson, Berlioz ou Massenet ; elle a glissé entre ses plages des pièces d’Ermend Bonnal, compositeur un peu plus jeune que la génération citée. La jeune cantatrice ressort ainsi les partitions de son arrière-grand-père et s’inscrit dans sa lignée musicale.

« On a ses racines dans le ciel », philosophe l’Hermétique. Cette devise  dessine la ligne de vie de la soprano Roselyne Martel qui vient de graver chez Calliope Records : Reflets solaires. La cantatrice a consacré son deuxième opus à la mélodie française, empruntée à Massenet, Berlioz , Gounod ou Chausson, entre les plages elle a glissé de la littérature d’Ermend Bonnal (1880-1944) qui n’est autre que son arrière-grand-père. Bon sang ne saurait mentir, la cantatrice confie qu’elle s’inscrit dans cette tradition familiale et qu’elle a baigné dans la musique, bercée par les mesures mélodiques de son parent compositeur.

D’aucuns relèvent le nom de leur aïeul emporté par la Guerre car il risque de disparaître ou de se perdre dans les méandres du temps. Roselyne Martel n’a eu besoin de cet artifice juridique, elle confie que sa maman perpétue le nom de Bonnal, qu’il suffisait à Roselyne de l’associer à son patronyme pour configurer cette filiation : « Je la revendique. On sait dans la famille qu’Ermend Bonnal avait une grosse personnalité, comme beaucoup de ses enfants. Je pense que c’est génétique ; parmi sa descendance, on compte beaucoup de musiciens. »

Roselyne Martel Bonnal, soprano. Crédit photo Fabrice Le Guernec.

Roselyne Martel Bonnal défend l’idée qu’un artiste lyrique peut se partager entre les différentes formes de son art. Crédit photo Fabrice Le Guernec.

Est-ce que le nom de Bonnal oblige ? La réponse l’affirme : « Enregistrer des mélodies d’Ermend Bonnal a été un choix, ça répondait à une envie. » D’autant, qu’elle est consciente qu’il est essentiel de se démarquer pour préparer un CD : « Il sort des millions d’albums et il y a tellement de doublons. On m’a conseillée de trouver un angle différent. » L’originalité était en elle, dans ses gênes. Pourquoi chercher plus loin ?

Se différencier pour être reconnue, car elle n’est pas une adepte des réseaux sociaux pour exister.

Si Roselyne Martel défend son aïeul, elle ne refuse pas une production opératique : « La relation à la scène, entre la mélodie et l’opéra est différente, mais les deux activités sont très excitantes et elles ne sont pas antinomiques. Ma technique vocale  permet de tout faire. »  Une technique qu’elle continue de travailler avec Nadine Denize, mezzo de l’école française retirée de la scène : « Je suis en quête de perfection. Maintenant, toutes les deux, on travaille moins la technique mais plus l’esthétique. » Une recherche d’idéal lyrique où soupire une pointe de regret : « J’ai attendu trop longtemps pour faire des concours. Il faut les faire jeune. » Ce qui ne l’a empêché de remporter celui des Saisons de la voix à Gordes (84).

Formée à Nice, Paris, Salzbourg et Munich
Pour façonner son instrument et peaufiner son art, Roselyne Martel Bonnal a franchi le Rhin et rejoint les écoles de Salzbourg et de Munich. Pour faire sourdre les compositions de son arrière-grand-père, Roselyne Martel Bonnal s’est réfugiée à la Bibliothèque nationale de France afin de fouiller ce patrimoine : « Enregistrer des disques permet aussi de laisser des traces à celui qui fera des recherches plus tard. Par exemple, on sait qu’une sonate de Bonnal n’a pas encore été enregistrée. »
Crédit photo Fabrice Le Guernec.

Roselyne Martel Bonnal chante au sein de l’ensemble Hesperis. Crédit photo Fabrice Le Guernec.

Elle poche aussi son bonheur d’avoir approché le maestro Michel Plasson, en 2017 : « Il m’a dit que j’avais une voix française. » Une voix française ! assurément c’est un compliment dans la bouche du chef d’orchestre qui n’a cessé de défendre le répertoire de l’Hexagone : « J’ai un faible pour les héroïnes romantiques qui se suicident. J’adore ! J’ai chanté Louise de Charpentier, c’était un moment fort.»

Entre la mélodie et l’opéra ou opérette, Roselyne Martel Bonnal a laissé un intervalle pour la musique baroque : « Je chante dans l’Ensemble de musique chambre Hesperis. On considère la voix comme un instrument à part entière. » Elle assure qu’elle n’a pas tiré de plan de carrière : « Pour l’instant je suis très heureuse entre les Ciné-concerts, l’ensemble Hesperis et les concerts ou les productions. J’aime chanter par cœur je me trouve libérée. »

Pour l’instant en cette période où la vie semble suspendue, la musique lui manque, plus encore quand elle s’est retrouvée grippée avant le début de cette situation sanitaire mondiale. Un handicap pour les chanteurs ? Certes ! Roselyne Martel rappelle que le chant est avant tout physique et que comme tout bon sportif, elle se doit de travailler régulièrement.

Quand l’alarme actionnée par les puissants a arrêté les concerts, on pouvait penser que les artistes se lançant dans la carrière pouvaient alors s’inquiéter. Roselyne Martel préfère s’appuyer sur les précédents événement pour son analyse : « L’art, dont la musique, fera toujours partie de notre univers, et on aura toujours besoin de musiciens. On est tous en demande de divertissements et de transcendance. »

Maman d’une petite fille, elle se partage entre passion et devoir, elle souhaite toutefois privilégier son métier : « Ma fille est arrivée comme ça. J’adore la fonction maternelle, mais il faut faire des choix dans la vie. Je connais des musiciens qui ont deux ou trois enfants, mais je n’ai pas cette faculté. »

 

Bruno ALBERRO

 

Le coin CD

Reflets solaires par Roselyne Martel est sorti chez Calliope.

Reflets solaires par Roselyne Martel est sorti chez Calliope Records.

Le label Calliope a sorti « Reflets solaires », gravé par Roselyne Martel, soprano ; Guillaume Latour, violon ; Juliana Laska, violoncelle et Flore Merlin, piano. Il a obtenu Quatre étoiles pizzicato  par une revue luxembourgeoise.

Le CD réunit les titres : La Captive d’Hector Berlioz ; On dit de Jules Massenet ; Elégie de Jules Massenet ; Sur Le Lac Triste d’Ermend Bonnal ; Chanson Perpétuelle d’Ernest Chausson ; Petit Poème d’Ermend Bonnal ; Menuet de Cecile Chaminade ; Les Yeux Clos de Jules Massenet ; Improvisation d’Ermend Bonnal ; Le Colibri d’Ernest Chausson ; L’absent de Charles Gounod ; Bosphore d’Ermend Bonnal ; Chère Nuit d’Alfred Bachelet ; ChêneGaulois d’Ermend Bonnal ; Le Soir de Charles Gounod.

Où entendre Roselyne Martel Bonnal ?

  • Le 16 mai à Verdun en Ciné concert avec l’Ensemble Duruflé composé de : Roselyne Martel Bonnal, Magali Goimard, Jean Paul Farré, Laurent Veray, Olivier Lande ; 
  • Le 6 juin en concert autour du disque « Reflets Solaires »  à la salle César Franck Schola Cantorum de Paris avec le violoniste Guillaume Latour, la violoncelliste Juliana Laska et la pianiste Flore Merlin ; 
  • En juillet à la Villa Arnaga à Cambo-les-Bains (Reporté);
  • En septembre en concert de musique espagnol à Blois. Au programme Granados, De Falla, Obradors, Lorca ; Reporté
  • En octobre  à Orgelpark d’Amsterdam en concert orgue et voix avec l’organiste et compositeur David Maw. Au programme Canteloube et Bonnal ; Reporté.
  • En février au Musée Gustave Moreau en concert autour du CD Reflets solaires ;
Renseignement à Roselyne Martel Bonnal