On pouvait s’y attendre, les Chorégies d’Orange ont décidé de ne pas maintenir la saison 2020. De quoi rager quand tous les feux étaient au vert pour un mois de juillet lyrique qui s’annonçait exceptionnelle. De quoi rager surtout que depuis quelques années, le plus vieux festival, qui a fêté l’an passé ses 150 ans, était sur la sellette. Si d’aucuns s’interrogeaient sur son avenir, Jean-Louis Grinda, le directeur rassure : l’affiche 2021 reprendra dans les grandes lignes celle de cette année, étouffée par un virus à rayonnement planétaire.
Il n’y aura pas de 151e édition des Chorégies d’Orange. Du moins pas cet été 2020. La Société publique locale de la Région Paca avec son président Renaud Muselier et le directeur du festival Jean-Louis Grinda en ont fait l’annonce. Après ce coup de massue, Jean-Louis Grinda annonce que l’affiche serait en grande partie reconduite en 2021 : « Roberto Alagna vient à l’instant de me donner son accord pour Samson et Dalila (De Camille Saint-Saëns). On a bon espoir avec Marie-Nicole Lemieux. Je pense que le ballet Béjard et le concert Cécilia Bartoli seront reconduits. Pour la Ve symphonie, je ne sais pas, mais ce n’est pas le plus difficile. Par contre, il n’y aura pas la Force du destin de Verdi, on reviendra à une production d’opéra et non une version concertante. »
Il glisse que des discussions sont en cours avec France télévisions pour que Musiques en fête ait lieu : « Ce peut être en septembre. Dans la première quinzaine. En discussion aussi, la diffusion d’un spectacle capté du théâtre antique, mais sans public. Pour nous, c’est bien à condition de régler le problème financier. Car on ne peut pas participer à une production si on n’a pas de recettes. »
S’il ne départit de sa bonne humeur, Jean-Louis Grinda glisse toutefois que l’année s’annonçait exceptionnelle : « Nous avions 15000 réservations, ce qui n’était plus arrivé depuis vingt ans. Avec l’équipe, on s’était dit que c’était trop beau et qu’il allait bien arriver une catastrophe. On le disait en plaisantant mais on ne pensait pas à ça. D’ailleurs, j’ai soixante ans cette année, je travaille depuis 1981, presque quarante ans et jamais on avait imaginé une situation pareille. »
Les prévisions, qui n’en sont plus, réconfortent néanmoins le patron du festival dans ses choix : « Nous constatons que notre projet artistique était validé. J’ai toujours dit qu’il fallait trois ans pour le mettre en marche et que cette édition après celle des 150 ans était très appréciée et qu’on commençait à engranger. Mais c’est comme ça ! Nous ne sommes pas inquiets pour l’année prochaine car notre public est un public de territoire. »
Jean-Louis Grinda se dit plus pessimiste pour les théâtres et les maisons d’opéra dès la rentrée : « Je ne crois pas que les gens vont se précipiter dans les salles. Ça veut dire que les intermittents seront six mois sans travailler, voire huit mois, ou plus, pour ceux qui n’avaient pas de projets en septembre. En Région Paca, le président a dit qu’il allait débloquer des fonds. »
Le directeur du festival espère que cette pandémie génèrera une prise de conscience des pouvoirs publics à propos de la Culture en général : « De facto, on a laissé ouvert les commerces indispensables. On a considéré que les librairies n’en faisaient pas partie, alors que dans les familles confinées la Culture est devenue essentielle que ce soit la lecture, regarder des films ou des productions de concert ou d’opéra en streaming. Et on n’a jamais compté autant de vues. Ça montre que la Culture est indispensable. »
Quand le confinement cessera, Jean-Louis Grinda jauge qu’il y aura un après dans la conscience collective : « C’est souhaitable qu’on réfléchisse aussi à l’écolologie. Avec cette pandémie, on peut se dire que ce n’est pas demain qu’on doit prendre des mesures, c’est aujourd’hui. On voit bien qu’on respire mieux dans nos villes… Ce que j’ai apprécié dans le discours du président Macron c’est quand il a parlé de l’éducation pour expliquer que les enfants doivent retourner à l’école. Surtout quand il a expliqué que les inégalités se creusent de ne pas aller à l’école, quand on a un seul ordinateur dans une famille cinq personnes… Rater une année scolaire, c’est un décrochage à vie. »
Renseignement aux Chorégies d’Orange