Pour l’ouverture de sa saison opératique, l’Opéra de Marseille a demandé à Frédéric Bélier Garcia de donner sa vision de Macbeth de Verdi. Le metteur en scène s’est penché sur la conscience et la part d’humanité des personnages. Il s’appuie sur un duo de rôles titres convaincant avec une séduisante Anastasia Bartoli. La soprano règne sur la distribution, avec un théâtre expressif dans sa relation avec son marie et roi, interprété par le baryton slovaque Dalibor Jenis.

Anastasia Bartoli campe une lady Macbeth dans le verbe et dans le geste. Photos Christian DRESSE.
Frédéric Bélier Garcia raconte Macbeth, l’opéra de Verdi en juxtaposant des tableaux sur la scène l’Opéra de Marseille qu’il a investi jusqu’au dimanche 9 octobre. Le plateau glisse de tableau en tableau invitant le spectateur à longer ce musée où s’alignent des toiles du XVIe siècle emplies des consciences, des destins voire des parcelles de repentir.
Bien sûr aucun metteur en scène ne toucherait au livret, comme on peut le faire au théâtre, ce serait un crime de lèse-majesté. Pourtant le metteur en scène se doit de trouver une émotion à raconter et à développer, de garder une ligne artistique pour donner sens et crédit à son propos. Actualité aidant, qu’elle soit internationale ou nationale, il eût été facile à Bélier Garcia de tomber, pour ne pas dire sombrer, dans les poncifs. Que nenni ! Il s’est rapproché des personnages pour en dégager une subtile analyse. Il a choisi d’allumer en chacun des protagonistes une lumière intérieure, posant comme axiome que tout être possède une part de divinité, soit-elle enfouie au plus près des ténèbres, dont on ne revient pas.
Pour s’en assurer, il suffit de s’attarder à l’avant, avant dernière scène quand la reine se prépare à mourir en confessant ses pêchés. Lady Macbeth ne s’effondre pas morte ou ensanglantée, mais vêtue du blanc de la lumière qu’elle a perçue, elle pousse la porte de la vie. Quant à Macbeth, Frédéric Bélier Garcia accentue le trait de la médiocrité pour peindre le roi avide, dont le rêve était de porter la couronne, tout en étant trop lâche pour cela.
Quand le propos est posé, encore faut-il le réaliser. Pour cela, il faut que le metteur en scène fasse accepter ses idées par ses interprètes. De toute évidence, Frédéric Bélier Garcia a été entendu, parfois même à la limité de l’excès. Il dispose d’une palette de solistes où règne Lady Macbeth, interprétée par la soprano italienne Anastasia Bartoli ; elle éclabousse le plateau de ses yeux de braise animée par le désir et l’ambition. On attend aussi qu’elle chante, rassurez-vous c’est le cas. Son chant est habitée par sa passion et ses émotions fussent-ils dévastateurs !
Anastasia Bartoli ne laisse pas de marbre le baryton slovaque Dalibor Janis qui se ceint de la couronne d’Ecosse. En constant changement au long des quatre actes, lui-aussi fait chanter son théâtre, glissant du gamin envieux au roi illuminé, influencé par ce qu’il croit être son destin. La basse française Nicolas Courjal est un habitué de la scène phocéenne. Cette fois il a délaissé son costume de méchant pour aller vers un autre registre avec son personnage Banquo. Comme à son accoutumée, le chanteur est à l’aise sur le plateau comme dans son interprétation. Formé au théâtre avant de se découvrir le chant lyrique, le ténor Jérémy Duffau fait montre d’expressivité pour colorer sa ligne de chant. Dans l’opéra verdien, il campe Macduff brisé par la mort de sa femme et de ses enfants par la main de Macbeth. Dans la dernière scène, il met fin à la vie du tyran, il fera roi Malcolm interprété par le ténor espagnol Nestor Galvan. Laurence Janot et Jean-Marie Delpas, des fidèles de la cité phocéenne, complètent cette distribution.
Mais pour une fois dans un opéra, dans plus encore dans cet ouvrage où il est souvent sollicité, il faut rendre hommage au Chœur de l’Opéra de Marseille, dirigé par Emmanuel Trenque. Il quitte la maison phocéenne à la fin de la saison pour transmettre sa lecture musicale au théâtre de la Monnaie à Bruxelles. Au fil des ans, il a su patiner l’ensemble vocal marseillais dans les moindres détails. Pour ce chœur, ce Macbeth en est la preuve.
On ne peut passer sous silence l’influence du maestro Paolo Arribabeni, lui aussi un habitué de l’Orchestre de l’Opéra de Marseille. Sa baguette est devenue celle du coloriste qui a su peindre avec savoir et délicatesse, ce drame de l’ambition.
A l’Opéra de Marseille en bref
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Mardi 04 octobre à 20h ; Jeudi 6 octobre à 20h et dimanche 9 octobre à 14h30: Macbeth de Verdi à l’Opéra de Marseille.
Renseignement à l’Opéra de Marseille