Le dernier opéra donné pour les 150 ans des Chorégies sera Don Giovanni de Mozart. La mise en scène est de Davide Livermore alors que la direction de l’orchestre de l’Opéra de Lyon revient à Frédéric Chaslin qui partage sa carrière entre la composition et le pupitre de maestro.

Frédéric Chaslin donnera le tempo de Don Giovanni de Mozart les 2 et 6 août. Ce n’est pas sa battue qui rythme sa vie, dit-il mais la composition. Le chef d’orchestre remonte ainsi les années en partant de 2018 avec la création de Monte-Cristo avec Placido Domingo. Frédéric Chaslin s’inscrit donc dans la tradition des compositeurs et chefs d’orchestre : « J’aimerais bien m’installer dans la salle et écouter. » Rhétorique espiègle pour glisser autrement que les opéras contemporains sont peu joués, les siens comme les autres. Le maestro explique que depuis Britten, la faille s’est agrandie entre le public, le compositeur et la musique classique actuelle : « Nous avons eu la musique minimaliste en réaction à celle plus complexe de la génération précédente. Un excès a remplacé un autre. Je pense que les bonnes comédies musicales entreront au répertoire, comme West side story. Je ne suis pas insensible au travail de Philippe Hersant, je pense qu’il pourrait aller plus loin. »
Il aurait aimé composer des musiques de film mais il trouve qu’aujourd’hui, le cinéma accepte des schémas qui ne lui conviennent pas : « Je suis resté à l’opéra et j’écris ce que j’aime : des arias, des duos, des trios. »

Frédéric Chaslin, chef d'orchestre dirigera Don Giovanni de Mozart aux Chorégies d'Orange?

Frédéric Chaslin, chef d’orchestre dirigera Don Giovanni de Mozart aux Chorégies d’Orange?

Le chef et compositeur rappelle qu’il a collaboré avec Roger Waters quand le bassiste des Pink Floyd avait composé son opéra : « Ça ira », sur la Révolution française : « Ça n’a pas eu de succès. Il a voulu écrire comme Berg ou Weber alors qu’il aurait dû faire du Pink Floyd. »
Frédéric Chaslin fait confiance au temps, le temps qui décide du moment des choses : comme cette rencontre à la terrasse d’un café à Orange avec Jean-Louis Grinda, directeur des Chorégies d’Orange : « Ce n’était pas un appel téléphonique mais j’ai été tout autant surpris de la proposition qu’il me faisait. J’y pensais bien sûr qu’un jour je pourrais diriger au théâtre antique, en me disant que si les choses doivent se faire elles se feront. Je suis venu enfant aux Chorégies et c’est un rêve d’enfant qui se réalise. J’ai chez moi le casque de Birgit Nilsson (1918-2005), qu’elle portait dans son rôle d’Isold (NDRL en 1973 et en 1975), c’est en papier mâché très léger, alors qu’on dirait du bronze lourd. J’ai un bout de l’histoire des Chorégies chez moi.»
Cette pièce souvenir est posée sur un meuble dans sa péniche accostée sur les quais à Paris. Quand on vous disait que Frédéric laisse le temps au temps, d’autant qu’il navigue aussi pour des vacances au fil de l’eau : « Gilbert Bécaud vivait aussi sur une péniche. J’étais allé lui rendre visite et j’ai eu un coup de foudre. La mienne mesure 40 mètres. On peut aller très loin.  Je suis du signe du capricorne c’est à dire tenace et pas pressé. Quand je suis pressé c’est pour les autres : ma famille ou mes amis qui veulent savoir et découvrir. Mozart était un homme pressé, j’ai acheté le fac-similé de la partition de Don Giovanni et elle est raturé, il a même rayé des mesures car il s’était trompé. C’est vrai que Mozart était dans l’urgence.»
Les parents de Frédéric Chaslin lui disent que déjà tout petit il battait la mesure en écoutant la musique : « Je pense que beaucoup d’enfants font ça. Par contre je me souviens  quand je devais avoir quatre ou cinq ans, nous sommes allés dans un magasin d’antiquités et il y avait un harmonium. Je me suis précipité  vers le meuble, j’ai soulevé le couvercle et j’ai posé mes doigts sur les touches.  Après cela j’ai commencé le piano. »
L’apprentissage l’a amené à suivre les conseils d’Aldo Ciccolini (1925-2015), lui-même, avant de laisser le piano et d’apprendre la direction d’orchestre à Paris, Salzbourg ou Vienne.
Trois villes éternelles où le temps n’a pas de prise.

Bruno ALBERRO

 

Au Programme des Chorégies d’Orange

Les Chorégies d’Orange fête leurs 150 ans du 2 juillet au 6 août, cette année avec douze dates pour treize spectacles. Deux opéras sont à l’affiche : Guillaume Tell de Rossini et Don Giovanni de Mozart. La VIIIe symphonie de Mahler sera à la dimension de l’événement avec l’Orchestre national de France et le Philharmonique de Radio-France réunis pour la première fois de leur histoire. Outre les concerts et la danse avec Roméo et Juliette du ballet de Monte-Carlo, la venue de la soprano Anne Netrebko, la présence de Placido Domingo, et Jeff Mills, le singulier prince de la musique électro au sein du festival lyrique, étoffent l’affiche.

  • Le 20 juillet, gala Netrebko et Eyvazov Annulé ;
  • Le 29 juillet, la VIIIe Symphonie de Mahler ;
  • Les 2 et 6 août, Don Giovanni de Mozart ;
  • Le 4 août, Ciné-concert avec Jean-François Zygel.

Renseignement aux Chorégies d’Orange